Monastère Saint Silouane

La foi et les démons

La foi et les démons
Mt XVII, 14-23
Au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen

Si les disciples n’ont pu guérir cet enfant, le Seigneur leur dit, non sans réprimandes, que c’est parce qu’ils n’ont pas suffisamment la foi. Alors qu'est-ce que cela veut dire exactement ? Probablement que les disciples étaient séduits par le Christ Jésus, par sa Parole, par ses actes, par sa personne même mais qu’ils en restaient à un plan humain. probablement aussi que leur foi n’était pas suffisamment vive en ce sens qu’ils croyaient d’avantage en eux plutôt qu’en Dieu et qu’ils pensaient avoir un certain pouvoir mais ils oubliaient que ce pouvoir ne pouvait venir que de Dieu. Et c’est pour cela que le Seigneur se fâche, à la manière orientale bien sûr, il les traite d’engeance incrédule et pervertie. Ce sont des mots forts – nous sommes en Orient, en Orient le langage est direct et les mots dépassent la pensée très souvent. Mais le Seigneur veut signifier par là qu’il y a quand même quelque chose qui ne va pas chez les apôtres. Il parle d’incrédulité, d’insuffisance de foi. Et puis il y a une deuxième chose : il leur dit plus dans l’intimité, quelques heures après alors que les apôtres lui demandent pourquoi ils n’ont pas réussi à chasser ce démon qui était dans cet enfant, Il leur dit clairement : « Cet espèce démon on ne le chasse que par le jeûne et la prière ». Là aussi, Il leur donne une clé, une clé fondamentale : le jeûne est la prière comme moyens pour chasser les démons. Alors peut-être vous pensez « mais les démons, je ne les connais pas beaucoup et pourtant, et pourtant, si nous nous examinons un peu, nous verrons que le démon est souvent à l’attaque, que le démon est souvent proche de nous pour essayer de nous séparer de Dieu, que le démon est souvent dans nos communautés, dans nos familles pour nous diviser, le démon est subtil, il est intelligent même. Il sait nous dire : « Regarde, ce frère n’est pas capable, regarde cette sœur elle est inutile, regarde comme elle tombe dans le péché, regarde comme il est faible, sous-entendu et comme moi je suis fort ». C’est valable dans nos microsociétés, dans nos cellules d’église qui sont nos familles d’abord, le monastère, la paroisse, le diocèse. Nous avons toujours des démons qui sont présents et à certains moments ils sont même virulents : ils attaquent avec force, ils veulent détruire totalement et si possible ils veulent détruire l’Eglise puisque c’est le lieu de Dieu et c’est notre lieu aussi. Alors le Seigneur nous donne deux consignes : que notre foi soit vive. Il nous faut d’abord croire en Dieu au lieu de croire en nous .. Il nous faut d’abord commencer, commencer par prier et jeûner et puis ensuite agir selon nos possibilités, selon notre intelligence, selon nos capacités et nos dons mais d’abord il faut commencer par prier et jeûner. Et ceci ne peut être vécu que dans la foi, autrement dit il faut croire d’abord en Dieu avant de croire en nous. Il y a une petite coutume monastique, assez insignifiante apparemment et qui pourtant est très parlante, je trouve. Lorsque, nous autres, les moines et les moniales, nous devons prendre un médicament, avant de l’ingurgiter, nous le bénissons .Non pas par ritualisme – ce serait inutile dans ce cas-là – mais tout simplement parce que nous faisons appel à Dieu avant de prendre le médicament parce que c’est Dieu qui guérit. Probablement il nous guérira au travers des médicaments mais il nous faut d’abord demander le secours de Dieu puis ensuite prendre le secours humain que Dieu a mis à notre disposition au travers de l’intelligence des hommes, des médecins, des pharmaciens, des soignants et c’est valable pour toute chose. Commencer à croire en Dieu, croire que Dieu peut tout et particulièrement nous guérir et de nous libérer des démons qui nous envahissent. Et puis ne pas hésiter à vivre le jeûne et la prière.  Il n’est pas besoin de faire des kilomètres de prière. Dieu se bouche les oreilles quand nous rabâchons toujours les mêmes prières sans penser à rien. Il suffit de se tourner avec le cœur vers le Seigneur et de lui dire « Aie pitié, aie pitié de moi, aie pitié de mon frère, aie pitié de l’humanité ». Mais de le dire sincèrement, non pas du bout des lèvres, non pas du bout de l’intellect mais avec le cœur. Cette prière-là elle a un sens pour Dieu. Quand on jeûne, bien sûr nous pensons tout de suite au jeûne alimentaire et pourquoi pas ? Car le jeûne alimentaire est de grande utilité pour nous purifier, non pas purifier notre sang mais purifier notre âme. Mais il y a toutes sortes de jeûne : le jeûne de l’imaginaire, le jeûne des pensées que nous laissons entrer dans nos cœurs, le jeûne de l’inutile qui envahit le monde – il suffit de se trouver quelques minutes dans une grande ville pour voir que toutes les tentations sont là toutes les secondes. Il faut apprendre à jeûner de tout cela, à jeûner du regard. Et il y a encore beaucoup de sortes de jeûnes et vous les connaissez tous. Alors que le Seigneur nous donne de comprendre que nous devons entrer dans tous ces conseils qu’Il nous propose, que nous devons lui demander secours pour vivre ces conseils car seuls nous n’y arriverons pas mais c’est cela la foi : c’est se tourner vers le Seigneur pour lui demander secours. Et puis prenons les moyens qui sont à notre portée, ceux que l’Eglise propose. Nous sommes en ce moment dans le jeûne de la fête de la Mère de Dieu pour nous y préparer . Il y a toutes les sortes de jeûne que j’ai évoqués et ceux que je n’ai pas évoqués et que vous pouvez trouver par vous-mêmes. Oui que le Seigneur nous donne cette grâce de L’écouter. L’Evangile c’est une Parole et une parole cela s’écoute. La première phrase d’une des grandes règles monastiques qui existent, la règle de Saint Benoît, commence par ces mots : « Ecoute, ô mon fils ». Oui, il nous faut écouter la Parole de Dieu, celle que nous pouvons entendre le dimanche à l’église, celle que nous pouvons lire chez nous dans l’Evangile, celle aussi que le Seigneur adresse directement à notre cœur. Il nous faut l’écouter. Et si nous écoutons, alors nous sommes sur le chemin. Quel chemin ? Celui de la sainteté auquel nous sommes tous appelés malgré nos faiblesses et nos misères.


Amen

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